lundi 1 août 2016

"La finance de l'ombre a pris le contrôle"

En avril est sorti le dernier livre de Myret Zaki, "La finance de l'ombre a pris le contrôle", écrit conjointement avec Dominique Morisod.
Le sujet est si important que j'ai décidé d'en résumer les principaux points forts en quelques lignes.
Qu'est ce que la finance de l'ombre ? c'est "l'ensemble des activités et des acteurs contribuant au financement non bancaire de l'économie" (par exemple, prêts non bancaires aux entreprises).
Qui sont les acteurs de la finance de l'ombre ? ils sont non bancaires : fonds spéculatifs (hedge funds), courtiers-négociants et gérants, fonds d'investissement, sociétés (financières, de leasing, d'assurances ou de prêt immobilier) qui ne sont pas soumis aux contrôles des autorités de surveillance et aux réglementations bancaires (par exemple, pas d'exigences de fonds propres).
Combien pèse la finance de l'ombre (shadow banking) ? elle représente un montant de 80'000 milliards de dollars.
Pourquoi la finance de l'ombre s'est-elle autant et si vite développée ? Avec des taux d'intérêts proche de 0%, ses acteurs non bancaires peuvent emprunter de l'argent gratuitement en masse, pour l'investir à un rendement plus élevé (notamment en le prêtant à des entreprises, créant une bulle de crédit)
Où s'investit l'argent de la finance de l'ombre ? l'argent emprunté à un taux proche de 0% est investi dans les bourses non régulées (dark pools), les produits dérivés, les marchés obligataires, notamment prêts à des entreprises non cotées, en démarrage ou en difficulté (obligations spéculatives ou dette pourrie d'entreprises peu solvables, à rendement élevé mais avec le risque de perdre sa mise si l'entreprise fait faillite). Ainsi, la bulle de la dette enfle.
Quels sont les risques ? ils sont nombreux :
  • faillite d'entreprises, qui ne rembourseront donc pas leurs prêts (risque de défaut)
  • remontées des taux d'intérêts, d'où l'obligation pour les banques centrales occidentales de les laisser proches de 0% (sinon, risque d'explosion de la bulle de crédit)
  • demande de remboursement (par exemple en cas de krach boursier) : si de multiples créanciers / investisseurs retirent leur financement, ne renouvellent pas leurs prêts ou vendent leurs produits, le débiteur est alors exposé à un risque de liquidité / d'insolvabilité, l'empêchant de rembourser.
  • et surtout menace de contagion à tout le système financier : les craintes de faillites poussent les banques à ne plus se prêter de l'argent entre elles, donc tout le système de crédit se bloque; or, l'économie réelle (entreprises et particuliers) a aussi un besoin vital d'avoir accès au crédit pour commercer, acheter, vivre (notre monde moderne est basé sur la capacité à acquérir maintenant et à payer plus tard, ne serait-ce qu'avec les paiements par carte). Donc sans crédit, plus de commerce, et sans commerce, tout s'arrête (voir l'article précédent sur l'effondrement).
Les auteurs posent la question : "qui sauvera le système ?". La réponse est : personne. "La progression de la finance de l'ombre promet de suivre une courbe exponentielle. Jusqu'à l'explosion finale." Alors, comme un château de cartes, le système financier et bancaire mondial s'effondrera.

Fred Deion

"La finance de l'ombre a pris le contrôle", de Myret Zaki et Dominique Morisod
http://www.editionsfavre.com/info.php?isbn=978-2-8289-1572-8