vendredi 31 août 2018

Coup de gueule numéro 1 : la déshumanisation du monde du travail

Dans un précédent article, je pointais (entre autres) les méfaits de la robotisation et de la révolution numérique, puisqu'ils causent destruction ou précarisation des emplois.

Et quid des chanceux qui se sont maintenus à leur poste ? Leur traitement est l'objet de ce coup de gueule.

Depuis une dizaine d'années (une des nombreuses conséquences de la crise de 2008), le monde du travail s'est considérablement durci. Pour maintenir leurs marges, les entreprises ont diminué leurs effectifs, "flexibilisé" ou "précarisé" le statut de leurs collaborateurs (selon le point de vue d'où l'on se place), réduit salaires et avantages sociaux (avènement des working poors).

Pour les employés qui restent, la vocation rêvée peut devenir un enfer quotidien : surcharge permanente, stress, mise sous pression et mobbing, burn-out... ou quand le travail devient souffrance. Cette détresse se voit dans plusieurs indicateurs (pour autant que l'on veuille bien y prêter attention, plutôt que de tourner la tête pour regarder ailleurs) : absentéisme, turn-over ou taux de survie en entreprise, nombre de cas juridiques : toutes ces statistiques sont à la hausse, sans pour autant interpeller les conseils d'administration, qui préfèrent sans doute voir la productivité, le bénéfice ou le chiffre d'affaires augmenter.

Dans cette nouvelle jungle du travail, l'employé peine à se protéger des ces pratiques scandaleuses (et illégales) : crainte de représailles en cas de dénonciation auprès du médiateur interne (s'il y en a un), de l'inspection du travail, de son assurance protection juridique ou des médias (la posture du lanceur d'alerte reste délicate). Beaucoup choisissent alors une forme ou l'autre de résistance passive : cynisme en hausse, loyauté en baisse, prises d'initiatives limitées, passivité et service minimum (voire syndrome du passager clandestin).

Survient donc un revers de la médaille pour l'employeur : baisse de la satisfaction du personnel, de sa motivation, de sa performance. La diminution des effectifs précitée devient alors contre-productive : in fine, les résultats financiers sont moins bons que ce qu'ils pourraient être avec des collaborateurs motivés et performants.

Les employés, eux, préfèrent opter pour un modèle de relations plus harmonieuses, plutôt que basé sur la compétition. Ils se désengagent donc de la sphère professionnelle devenue toxique pour se fixer de nouveaux buts, se ressourcer ailleurs et réinvestir leurs loisirs (work-life balance).

Malgré les déclarations d'intentions (plaquettes de présentation, chartes, philosophie d'entreprises), il y a un écart toujours plus grand entre le discours des employeurs et le monde du travail qui semble devenir fou. Jusqu'à quand cela peut-il durer ? Tant va la cruche à l'eau, qu'à la fin elle se casse...