mercredi 1 avril 2020

Lettre d'Extinction Rebellion au gouvernement suisse

Madame la Présidente de la Confédération, Mesdames les Conseillères fédérales , Messieurs les Conseillers fédéraux,
Face à la crise engendrée par la pandémie de COVID-19, vous avez proposé des mesures ambitieuses d'aide à l'économie, démontrant ainsi que, lorsque la nécessité absolue est reconnue, des démarches d'urgence et la mobilisation de moyens exceptionnels sont possibles. (...)
Aujourd’hui, la "survie" de notre pays se joue intégralement sur le courage de personnes qui, hier encore, étaient les laissé·e·s-pour-compte de notre système. Si nous parvenons à vaincre le COVID 19, c'est à elles·eux que nous le devrons.
Cette situation met également en évidence que seule une société civile solidaire peut permettre à notre pays de surmonter cette crise, tout comme celles à venir.
Or, les prochaines crises seront très probablement les conséquences de la rapide évolution climatique et de la disparition de la biodiversité, comme les scientifiques nous en avertissent depuis bien longtemps déjà. Alors écoutons-les, tout comme nous apprenons à le faire, mais un peu tard, pour cette crise sanitaire !
Madame la Présidente de la Confédération, Mesdames les Conseillères fédérales, Messieurs les Conseillers fédéraux, vous avez entre vos mains une opportunité extraordinaire d’entamer dès aujourd’hui la transformation écologique et sociale que vous savez déjà indispensable et nécessaire à très brève échéance. La brutalité de cette pandémie montre que le modèle économique actuel a des pieds d’argile. Tous·tes, nous prenons conscience de notre incroyable vulnérabilité, mais aussi de l'occasion unique qu'elle représente de mettre en route le changement systémique qui s’impose dès maintenant.
Tant pour ce qui est des difficultés actuelles que pour celles, futures, liées à la destruction de notre environnement, nous attendons donc de votre part que soient prises les mesures de solidarité et d'anticipation qui s'imposent les seules dignes de la confiance que la population doit à bon droit pouvoir placer en vous et saisissons cette occasion pour vous réassurer de notre attention indéfectible au bien commun.

mardi 31 mars 2020

Lettre d'Extinction Rebellion aux parlementaires suisses

L’épidémie actuelle de coronavirus donne actuellement le sentiment que nos autorités politiques sont prêtes à agir rapidement, fermement et en toute responsabilité face à une menace grave pesant sur la santé publique.

Les enjeux de santé publique dus à catastrophe climatique et à l’extinction du vivant sont pourtant sans commune mesure avec la terrible pandémie actuelle, même si celle-ci devait contaminer la population mondiale dans sa globalité.

L’augmentation actuelle de la température mondiale est de 0.6°C. Ceci a provoqué l’été dernier des pics de chaleur de 40°C en Hollande, de 46°C dans le Sud de la France et de plus de 50°C en Inde. La réalité de ces extrêmes dépasse aujourd’hui déjà ce que l’on pouvait redouter pour un avenir lointain.

Le rapport 2018 du GIEC décrit les conséquences “très graves” d’une augmentation de la température terrestre moyenne de 1.5°C, celles, “gravissimes” d’une augmentation de 2°C. Il ne commente aucunement les conséquences d’augmentations plus importantes. Or, d’après les dernières études, l’Accord de Paris n’étant ni contraignant, ni même suivi par un seul pays signataire, nous nous approchons d’une augmentation de 4°C à 6°C.

Le climat n’est qu’une partie des menaces. L’extinction de masse des espèces et de l’ensemble du vivant, les pollutions et l’épuisement de toutes les ressources dont nous disposons, les famines de grande ampleur et les déplacements des populations en sont les autres facettes.
L’ensemble de ces bouleversements font courir à l’humanité un risque énorme. La disparition proche de l’espèce humaine est une possibilité réelle.

A ce sujet, nous sommes en droit d’entendre de votre part une communication massive aussi claire, exhaustive et honnête que celle qui prévaut actuellement sur la pandémie de coronavirus.
Le temps n’est plus au déni ou aux calculs politiques, nous avons le couteau sur la gorge. Ni un virus, ni un épisode caniculaire, ni une tornade, ni une famine ne s’assied à la table de négociation. Le temps n’est plus au marchandage, le danger est sourd et aveugle à notre temps politique.

Seul un sursaut collectif immédiat et de grande ampleur peut encore nous sauver. Vous en portez, de par votre rôle d’élu-e et de par les pouvoirs qui vous sont conférés, la double responsabilité de l’annoncer et de l’initier.

samedi 29 février 2020

Le principe de précaution

L'être humain a de nombreux amis : les énergies fossiles (pour tout un tas d'usage), l'agri-business et l'élevage intensif (pour se nourrir), les moyens de transport carbonés (pour se déplacer et acheminer les marchandises dont il a besoin), les centres commerciaux (pour assouvir son consumérisme)...

Avant, la science faisait aussi partie de ses amis : inventions, progrès, médecine, etc. Depuis que la science annonce à l'être humain des mauvaises nouvelles (réchauffement climatique, effondrement de la biodiversité), ils se boudent.

Puis l'être humain a ses ennemis : en gros, tout ce qui le tue (guerres, famines, épidémies). Sachant cela, c'est d'ailleurs surprenant de voir que tout au long de l'histoire, l'homme s'est entre-tué. Aujourd'hui, un des adversaires de l'homme est donc bien-sûr le terrorisme. Il y a aussi des particularismes régionaux : pour les USA, l'ennemi c'est la Corée du Nord, la Russie, l'Iran (liste non exhaustive). Pour l'Iran, c'est les USA, l'Arabie Saoudite, Israël. Pour Israël, c'est les pays arabes voisins, les Palestiniens, les Turcs. Pour la Turquie, c'est la Syrie (ils se tirent joyeusement dessus), les réfugiés et l'Europe (ouvrir ses frontières permet de transformer ses réfugiés en migrants, et menacer d'en inonder son voisin occidental).

Aujourd'hui, l'être humain a un nouvel ennemi : le Coronavirus.

Branle-bas-de combat, production industrielle chinoise au ralenti (et chute des bourses), villes italiennes en quarantaine, manifestations sportives et congrès annulés à travers toute l'Europe...

Que faut-il en retenir ?
Quand l'être humain veut prendre des décisions, il prouve que c'est possible de les prendre.
L'être humain agit lorsqu'il perçoit un risque pour sa propre vie (et encore : la pollution atmosphérique tue des millions de personnes chaque année en raison de maladies pulmonaires, mais les centrales à charbon tournent toujours à plein régime). Pour le reste du vivant, on s'en fout : plus d'un milliard d'animaux sont morts dans les incendies australiens, ils sont déjà oubliés (le grand stress en janvier était de savoir si l'open de tennis à Melbourne serait annulé : une petite balle jaune revêt donc plus d'importance qu'un koala).
Conclusions :
Pou ce qui est de la protection de la biodiversité, c'est l'inaction, l'indifférence, l'égoïsme, voir le cynisme, alors que pour combattre un virus, c'est une mobilisation mondiale avec prise de mesures draconiennes, juste en quelques jours, au nom du principe de précaution.
Si ce principe de précaution s'applique à un virus qui est un risque pour l'être humain, pourquoi ne s'applique-t-il pas aux autres espèces ?
Le sens des priorités, c'est que pour l'être humain et rien d'autre.
L'échelle des valeurs... quelles valeurs ?

samedi 25 janvier 2020

C'était mieux avant ?

Je vais réagir ici à un article paru dans la Tribune de Genève (journal qui n'est pas une référence, que je ne lis pas et achète encore moins, mais qu'un ami m'a fait suivre). Son titre : "C'était mieux avant ? Ben, pas vraiment". On peut y lire : "Voici les faits (...) Si on considère les choses à long terme, le monde ne s'est jamais aussi bien porté qu'aujourd'hui". Suivent des statistiques anthropocentrées à l'appui de cette thèse : taux d'alphabétisation en hausse, diminution des victimes de guerre et de la mortalité infantile, bonheur humain en hausse, etc. 
Tout cela est exact, mais ces données ne se rapportent qu'à notre espèce.
Alors si les statistiques humaines se sont notablement améliorées ces 50 dernières années, les indices de la vie sur Terre n'ont fait que se dégrader sur la même période : effondrement de la biodiversité (diminution de 80% de la quantité d'insectes et de 60% des vertébrés), pollutions, surpêche, destruction de l'habitat naturel et déforestation, etc.
Pire : notre bien-être actuel s'est fait sur le dos de la nature et au détriment des autres espèces.
Si on pouvait demander aux animaux s'ils sont satisfaits de leurs conditions de vie, répondraient-ils comme nous ? Dépêchons-nous de leur poser la question : au tigre asiatique, au jaguar américain, à l'ours polaire, au gorille ou au rhinocéros africain, au koala australien, et à tous leurs autres potes du monde animal, oui dépêchons-nous de leur demander, car lorsqu'ils auront tous disparus, ils ne pourront plus nous répondre.
Penser que le bonheur humain est décorrélé de la nature est une erreur que nous paierons cher : l'être humain ne peut survivre hors-sol, nous sommes interconnectés avec notre environnement dont nous dépendons pour respirer de l'air pur, nous abreuver d'eau fraîche, nous nourrir sainement. En détruisant la nature pour obtenir un bien-être éphémère, nous mettons en grave danger notre futur. L'article disait : "Voici les faits (...) Si on considère les choses à long terme, le monde ne s'est jamais aussi bien porté qu'aujourd'hui". Vraiment ? Si on considère les choses à long terme, disons, ces 20, 30 ou 50 prochaines années, quelles seront nos conditions de vie sur Terre ? Que donneront alors les mêmes statistiques ? Il me semble prudent de ne pas s'en réjouir trop vite.

dimanche 15 décembre 2019

10ème et dernier coup de gueule : honte, scandale, inaction et déni de démocratie

La COP25 s'est réunie 2 semaines à Madrid, pour ne rien décider.
Quelques pays, notamment les USA (dont le président Trump a décidé de sortir de l'accord de Paris), la Chine, l'Inde, le Brésil (dont le président Bolsonaro déforeste à tout va l'Amazonie), l'Arabie Saoudite (2ème pays producteur de pétrole), l'Australie (qui brûle au point que Sydney est asphyxiée) ont bloqué toute avancée.

La même semaine, le parlement suisse ignore la progression verte aux élections d'octobre (le parti écologiste passe de 11 sièges à 28, soit une augmentation de 17 sièges) en lui refusant l'entrée au gouvernement. Le parti libéral-radical, avec à peu près le même nombre de sièges, maintient ses deux fauteuils de ministres, les Verts n'en obtiennent aucun : déni de démocratie.

Alors que va-t-il se passer ? Les scientifiques vont continuer de tirer la sonnette d'alarme, les jeunes vont continuer de manifester dans la rue, les militants climatiques vont poursuivre leurs actions, les politiques vont continuer de ne rien décider, de ne prendre aucune mesure et de se complaire dans l'inaction. La situation va continuer de se dégrader. Quelle honte et quel scandale.

samedi 30 novembre 2019

Deuil du monde d'aujourd'hui, et réactions à la perspective d'un effondrement

Il est courant de comparer l'état actuel de notre monde avec les étapes du deuil telles que modélisées par Elisabeth Kübler-Ross (à noter que ces étapes ne se déroulent pas forcément dans l'ordre chronologique ci-dessous, et peuvent donc être indépendantes les unes des autres).


La première étape, déni ou choc, peut correspondre soit aux personnes qui n'acceptent pas un certains nombre de faits ou constats (par exemple, les climato-sceptiques), soit aux personnes qui, prenant la mesure de la situation, en sont suffisamment ébranlées pour être incapables de toute réaction dans un premier temps (effet de sidération).
La seconde étape, la colère, va sûrement aller grandissant dans un futur proche : gilets jaunes qui continuent à descendre dans les rues françaises pour s'opposer à la réforme des retraites, mouvements sociaux au Chili, Algérie, Liban, Irak, Iran, Hong-Kong, etc. Dans un autre registre, des événements organisés par des activistes comme ceux d'Extinction Rebellion, vont probablement prendre de l'ampleur.
La 3ème étape, celle du marchandage, est illustrée par le triste spectacle des conférences pour le climat où les délégations négocient des droits à polluer, alors que des entreprises verdissent leur business via du greenwashing et du green-tech, pour tenter de redonner de l'espoir en notre modèle productiviste.
La 4ème étape est celle de la dépression, de la tristesse ou de la détresse. C'est l'étape où se trouvent les personnes qui réalisent que leur avenir, ou celui de leurs enfants, est compromis par un scénario d'effondrement qui devient de plus en plus probable.
La dernière étape est celle de l'acceptation, c'est-à-dire que cette perspective est acceptée par certaines personnes (une partie d'entre elles vont même réorganiser leur vie en fonction de leur prise de conscience : adaptation, préparation, résilience).

D'ailleurs, à ce sujet, l'auteur Pablo Servigne (dans son livre "Comment tout peut s'effondrer ?") décrit les 5 réactions suivantes face à la perspective d'un effondrement :
1) "ça va péter" : réaction composée d'impuissance face à la situation, de ressentiment et de nihilisme
2) "à quoi bon" : profiter de la vie pendant qu'il est encore temps, en latin, "carpe diem"
3) les survivalistes, en anglais, preppers : ceux qui se préparent à l'effondrement
4) les transitionneurs, qui appellent à une transition collective au niveau d'un village, d'une communauté ou d'une région
5) les collapsologues, qui étudient l'effondrement sous toutes ses coutures, échaffaudent des scénarios, lisent ou publient des articles, des livres, etc.
Il est inutile de chercher à se mettre que dans une seule catégorie : la nature humaine étant diverse et variée, bien souvent nous sommes un peu de tout...

jeudi 31 octobre 2019

La désobéissance civile, pacifique et non violente, peut-elle être légitime ?

Le 21 octobre, le journal le Temps publie une lettre ouverte du monde académique suisse intitulée "Nous déclarons notre soutien à Extinction Rébellion".
https://www.letemps.ch/opinions/declarons-soutien-extinction-rebellion-lettre-ouverte-monde-academique-suisse
En résumé, environ 80 universitaires apportent leur soutien à ce mouvement de désobéissance civile, car selon eux, "le contrat social a été brisé". Les gouvernements ont été incapables de prendre des mesures pour faire face à la crise climatique et environnementale : "cette inertie ne peut plus être tolérée (...) ; avec la raréfaction des ressources, l'effondrement de notre civilisation est probable (...) Lorsqu'un gouvernement renonce sciemment à sa responsabilité de protéger ses citoyens, il a échoué dans son rôle essentiel. Le contrat social a donc été brisé et il est dès lors fondé de se rebeller pour défendre la vie (...)"


Un blogger a réfuté ce soutien dans un article intitulé "j'ai un problème avec la désobéissance civile"

https://blogs.letemps.ch/marc-muenster/2019/10/21/desobeissance/?unapproved=486&moderation-hash=66e7b97789a0638f70037f5ea6176d95#comment-486
Dans ce blog, il compare un mouvement de désobéissance qui aurait pour objet de lutter contre l'avortement (où une vie à venir est en jeu), ou contre le mariage homosexuel (où aucune vie n'est en jeu), avec extinction rebellion qui milite de façon pacifique et non violente pour faire reconnaître l'urgence climatique (où l'enjeu est de sauver la vie sur Terre) : comparaison n'est de toute évidence pas raison. Il indique que la désobéissance civile n'est pas légitime lorsque les mécanismes de la démocratie fonctionnent : mais ces actions pacifiques et non violentes ne doivent pas viser à s'opposer ou à remplacer nos institutions démocratiques, mais simplement à inciter nos gouvernements à enfin agir (suivant en cela l'appel du secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres 
"il est très important d’exercer le maximum de pression sur les gouvernements").

Voici ma réponse à ce blog :

Rousseau, dans le contrat social, a écrit que l'intérêt particulier est contraire à la recherche de l'intérêt général. Le contrat social dont Rousseau fait la promotion institue un ordre social au service de l'intérêt général.
Lorsque des intérêts particuliers rompent ce pacte, cet ordre social devient tyrannique ou vain.
Les autorités politiques, dont le devoir est de protéger la population, ont failli : ils ne défendent que les intérêts particuliers des élites financières et économiques, des lobbies et des multinationales, leur cupidité et leur prédation, au détriment de la population, dont la survie est gravement menacée par les pollutions, le réchauffement climatique, l'effondrement de la biodiversité et la pénurie des ressources (c'est bien une question de survie dont il est question).
Le contrat social étant rompu, la désobéissance civile, pacifique et non violente, devient légitime, afin d'exercer cette pression sur les gouvernements pour enfin agir.
Voilà 50 ans que les faits scientifiques sont connus, et pourtant l'inaction, l'inertie, le déni, l'indifférence, ont prévalu. Il a fallu que des manifestations mettent la pression sur les autorités pour que les choses commencent enfin à bouger. Trop tard.
Le rythme politique et démocratique n'est malheureusement plus suffisant pour éviter le mur, ou l'iceberg. Il est trop tard. Comme le préconisent les auteurs collapsollogues (Pablo Servigne, Jean-Marc Gancille, Yves Cochet, etc.), on ne peut qu'au mieux se préparer à cet effondrement.

vendredi 13 septembre 2019

L'Histoire, la Nature, l'Homme, Dieu

Début de l'Histoire :
la Nature crée l'Homme (évolution darwinienne)
l'Homme crée Dieu (vie spirituelle et sacrée)
l'Homme tue Dieu (athéisme)
l'Homme saccage la Nature
l'Homme devient Dieu (manipulations génétiques, eugénisme, intelligence artificielle)
la Nature tue l'Homme (réchauffement climatique, effondrement écologique)
Fin de l'Histoire

dimanche 14 juillet 2019

La bucolique université d'Evergreen

Le 8 juillet a été postée sur Youtube une vidéo qui fait le buzz : plus de 200'000 vues en 5 jours. On y voit une sociologue invitée à donner une conférence sur le campus, Elle explique que tout propos exprimé est raciste : la question n'est pas de savoir si c'est raciste ou pas, mais comment est-ce raciste ? Elle affirme aussi que seuls les blancs peuvent être racistes, qu'ils le sont tous et qu'en tant que sociologue, elle peut faire cette généralisation. Ce mantra a été repris par le staff, l'administration et son comité éthique dans le but de combattre le racisme systémique, c'est-à-dire le racisme qui opère en tant que système.

Résultat : des élèves encerclent des professeurs en criant des appels à leur démission (sous prétexte que le professeur aurait exprimé une opinion raciste); Lors d'une réunion, le président de l'université (recteur) se fait insulter et humilier par une centaine d'étudiants en toute impunité; puis ils le séquestrent avec quelques membres de son équipe dans la bibliothèque le temps qu'il leur sera nécessaire pour répondre à leurs revendications (sans même pouvoir aller aux toilettes); enfin, des élèves prennent le contrôle des accès au campus, filtrent les véhicules entrants et sortants (pour mettre la main sur un professeur à qui ils avaient sommé de démissionner) et organisent une milice qui patrouille armée de battes de base-ball; etc.

Bienvenue à l'université d'Evergreen, dans l'Etat de Washington (nord-ouest des USA).

et bienvenue au visionnage de la vidéo en question : https://www.youtube.com/watch?v=u54cAvqLRpA

En fin de vidéo, son auteur demande aux étudiants français d'indiquer en commentaire si une telle idéologie a cours dans les facs en France ? et la réponse est : dans une moindre mesure, par une petite minorité extrémiste, mais oui quand même. A ce titre, l'UNEF est pointée du doigt (Union Nationale des Etudiants de France, syndicat étudiant d'extrême gauche). Pas surprenant, quand on peut lire sur la page Wikipedia de l'UNEF :
- En mars 2019, l'UNEF s'associe aux critiques et actions de blocage par des activistes antiracistes de la pièce de théâtre "Les Suppliantes" d'Eschyle jouée à la Sorbonne. Motif : les actrices interprétant les Danaïdes égyptiennes ont le visage grimé en sombre et portent des masques cuivrés. Ce maquillage est assimilé à la pratique du blackface (comédien blanc grimé en noir, surtout présent dans des spectacles aux USA au XIXème et première moitié du XXème siècle). L'UNEF y voit la "perpétuation de schémas racistes". Des personnalités du monde de la culture qualifient ces attaques de "logique de censure intégriste et identitaire". Des ministres condamnent "fermement cette atteinte sans précédent à la liberté d'expression". Pour un ancien responsable de l'UNEF, le syndicat est devenu "idiot, totalitaire, analphabète et obscurantiste" et est un "syndicat de talibans".
- En avril 2019, deux membres de l'UNEF moquent l'émotion qui accompagne l'incendie de Notre-Dame de Paris, la qualifiant de "délire de petits blancs". L'une des moqueuses s'était déjà fait remarquer en 2017 en estimant qu'il fallait "gazer tous les blancs, cette sous-race". La présidente de l'UNEF a été critiquée pour avoir tardé à condamner les messages de ses militants.
- En mai 2019, une journaliste accuse l'UNEF de "communautarisme anti-blancs" et constate qu'un "syndicat laïc, républicain, féministe, a versé dans un combat idéologique racialiste, antisémite et indigéniste".

Que faut-il en déduire ? On assiste à une polarisation inquiétante au sein de nos sociétés occidentales. Cette montée des extrêmes est un ferment de division, de haine, de troubles et de violences. Cela pourrait ne pas bien se finir, et nous aurons été prévenu.

dimanche 30 juin 2019

Nous pouvons partir en vacances tranquilles

Mois de juin agité, Trump va-t-en guerre (notamment avec l'Iran), l'été sera-t-il chaud (voire caniculaire) ? Rien n'est moins sûr.

1) D'abord il y a eu l'embrouille avec la Corée du Nord, pour ensuite se rabibocher avec Kim-Jong-un, au point de traverser dernièrement la frontière coréenne main dans la main (séquence émotion). Ensuite il y a eu la guerre commerciale sino-américaine, mais un accord n'aurait jamais été aussi proche (et les bateaux étrangers qui naviguent en Mer de Chine n'ont qu'à bien se tenir : Pékin veille). Et tout dernièrement, quelques actes de piraterie au large des côtes iraniennes seraient l'étincelle qui pourrait mettre le feu au poudre. Rassurons-nous, il n'en sera rien : pour rien au monde Trump ne renoncerait à ses vacances estivales en mode golf et farniente.

2) Et quid du côté de la météo ? Ciel bleu et soleil seront-ils au rendez-vous jusqu'à la rentrée au point de nous valoir un nouvel été caniculaire ? Nos nappes phréatiques ne sont pas encore asséchées, le stress hydrique ne frappe pas encore l'Europe, sécheresse et baisse subséquente des rendements agricoles ne sont pas pour tout de suite : on en reparlera dans quelques années.

3) Du côté de la bourse, peut-être ? Que nenni. Elle est au plus haut, les indices flirtent avec des records. Certes l'or remonte aussi, ce qui pourrait laisser songeur : mais pas de panique, aucun krach en vue, du moins pas avant l'automne (et même, depuis le temps qu'on l'annonce et qu'il ne vient pas...)

Alors il est temps de boucler ses valises et remettre le gilet jaune dans son coffre de voiture : ce serait ballot d'en avoir vraiment besoin en cas d'accrochage sur la route des vacances, ce que je ne souhaite à personne. Il sera toujours temps de l'enfiler à nouveau en septembre, car la rentrée sociale pourrait être, elle aussi, un peu chaude.

Alors bonnes vacances, partez tranquille, profitez-bien, et à la rentrée !
Fred

mercredi 1 mai 2019

Coup de gueule numéro 9 : la société sans cash

Une récente campagne de pub suisse (devrait-on dire, de propagande ?) et ciblant les jeunes, tente de faire passer le message que payer sans cash, c'est fun, cool et tendance ("do the cashless" avec son petit pas de danse : https://dance.cashless.ch/fr/)

Qui est derrière ce spot vidéo ? La communauté suisse des prestataires de cartes bancaires (UBS, Visa, American Express, etc.)

Leur but ? poursuivre leur guerre contre le cash, visant à sa suppression.

Avec quels intérêts pour eux ?
  • pour les banques, fermer des agences
  • réduire le nombre de distributeurs de billets (coûteux à entretenir et à approvisionner)
  • obliger leurs clients à être captifs : sans cash, obligation de déposer tous ses avoirs sur son compte, et d'utiliser les services numériques proposés. On fait travailler le client qui gère son compte lui-même, et on licencie des employés.
  • toucher des commissions sur les transactions, au détriment des commerçants, et des consommateurs si le prix est majoré.
Avec quels inconvénients pour les particuliers ?
  • atteinte à la sphère privée : toute transaction est inscrite et enregistrée, voire surveillée
  • exclusion financière, pour les personnes qui n'ont pas accès aux services bancaires
  • cybersécurité : vol de données personnelles et utilisation frauduleuse de vos moyens de paiement
  • en cas de pannes du système (coupures), impossibilité de payer ou de retirer de l'argent. A l'inverse, le cash ne dépend pas d'un centre de données, il est toujours accessible, disponible, utilisable, sans surveillance, ni contrôle à distance.
Une société sans cash, c'est une autre de nos libertés qui est supprimée. Ce sont les intérêts des institutions financières qui sont priorisés, à nos dépens. Cela ne fonctionne que lorsque tout se passe bien, mais rien, jamais, ne fonctionne toujours comme prévu (voir l'histoire du nucléaire : les "experts" affirmaient qu'un accident majeur était statistiquement "impossible". Il y a eu Windscale (UK), Three Mile Island (USA), Tchernobyl (URSS), Fukushima (J), pour ne citer que les plus graves...)

Si vous n'avez plus de cash, et que toutes vos économies sont sur un compte, vous devez alors faire confiance au système. En cas de panne (électricité, réseaux, serveurs et centres de données, etc.), vous n'aurez plus accès à vos avoirs.

En cas de crise financière (comme celle de 2007-2009), les banques peuvent faire faillite (comme Lehman Brothers) ou fermer temporairement (comme en Grèce). Les Grecs ne pouvaient retirer plus que 60 euros par jour, après avoir attendu des heures dans des files d'attente interminables... sauf ceux qui avaient eu la prévoyance d'avoir, à l'avance, une réserve de cash à la maison. Le secteur financier de Chypre a lui été sauvé en mettant les déposants à contribution ("bail in"). Les comptes de plus de 100'000 euros de Bank of Cyprus ont été ponctionnés à hauteur de 47,5%. La Laiki Bank ayant été liquidée, ses dépôts de plus de 100'000 euros ont subi une perte entre 80 et 90% de leur valeur. Vive les dépôts !

Après la crise financière, les taux d'intérêts ont baissé, pour arriver à zéro (déposer son argent dans une banque ne rapporte plus rien), voire en territoire négatif  (déposer son argent coûte, puisque la banque taxe votre argent). Devoir tout déposer sur son compte, puis se faire taxer par sa banque, c'est décidément fantastique ! Pour qui ? Alors, "do the cashless", et prêt à danser ?

mercredi 17 avril 2019

Coup de gueule numéro 8 destiné aux peureux, aux optimistes ou à ceux qui ne font rien

Un sentiment d'urgence commence à poindre. Enfin ?

Il faut dire que la réalité des chiffres est implacable.

1) Explosion démographique : la population humaine a presque quadruplé en moins d'un siècle.
En 1950, nous étions 2,5 milliards d'habitants sur notre planète. Au début des années 2020, nous serons environ 8 milliards. Les projections pour 2050 oscillent entre 9 et 10 milliards d'habitants, et pour 2100, entre 7 et 16 milliards... et si c'était moins d'un milliard ?

2) Alors que l'espèce humaine prospère, on assiste en parallèle à l'effondrement du vivant sur Terre, en quantité et en diversité : c'est la 6ème extinction de masse des espèces, mais causée pour la 1ère fois par l'une d'entre elles (nous). Cette extinction, actuelle et en cours, est entre 100 et 1000 fois plus rapide que le taux naturel de disparition d'une espèce :
- diminution de 80% de la quantité d'insectes (en 30 ans). Merci pesticides et insecticides, glyphosate, néonicotinoïdes, etc.
- disparition de 58% des vertébrés entre 1970 et 2012. Si on rallonge la période de 8 ans, de 1970 à 2020, la disparition des vertébrés est estimée à 67%.

3) Et nos ressources vitales ? celles qui nous nourrissent, et nous permettent de survivre ?
- en 2050 il y aura plus de plastique que de poisson dans l'océan
- en 2050 il faudra augmenter de 50% la production agricole par rapport à 2012, pour subvenir à notre alimentation, mais :
- l'agriculture occupe aujourd'hui déjà un tiers des terres émergées
- l'agriculture est responsable de 80% de la déforestation
- l'agriculture engloutit 70% de la consommation d'eau douce, alors que les eaux souterraines et les fleuves s'épuisent, augmentant le stress hydrique de plus en plus de populations : le déficit global d'eau douce est estimé à 40% d'ici 2030.

Aujourd'hui, 85% de notre énergie utilisée est toujours d'origine fossile. Cette addiction nous coûtera-t-elle la vie, comme un toxicomane qui n'arrive pas à décrocher de sa dépendance ? Il faudrait diminuer drastiquement nos émissions de CO2 (via une transition énergétique/écologique vigoureuse), mais nous semblons en être incapable. Sans volonté, ça va être compliqué; ça va être chaud...

Voici une petite équation intéressante : Réchauffement climatique et manque d'eau = sécheresse = insécurité alimentaire = famines.

Moins important que l'eau et la nourriture, d'autres ressources vont aussi manquer.
En 1970, 22 milliards de tonnes de matières premières ont été extraites de la terre.
En 2010, 70 milliards de tonnes
L'estimation pour 2050, ce sont 180 milliards de tonnes de matières premières qu'il serait nécessaire d'extraire de la terre pour les besoins de l'humanité. Heu... il y a 180 milliards de tonnes à extraire ?
De nombreux métaux utilisés dans l'industrie hi-tech sont en voie d'épuisement et n'ont pas de réserves connues qui vont au-delà de la décennie des années 2030. Fini les smartphones et autres gadgets électroniques... (inutiles, ils ne se mangent pas).

Comment réagir à ces données anxiogènes ?
- Avoir peur ? non, car la peur est contre-productive : elle inhibe la pensée, paralyse (effet de sidération), mène au désespoir et à l'inaction. Nous n'avons pas besoin de peur, mais de courage.
- Rester optimiste ? non plus, l'espoir est aussi contre-productif. L'optimiste pense que tout va s'arranger sans qu'il n'ait à modifier ni son comportement, ni ses habitudes. Surtout pas d'effort, shopping as usual. Nous n'avons pas besoin d'espoir, mais d'actions. Lesquelles ? Elles sont connues: moins d'enfants, moins de déplacements (notamment moins prendre l'avion), manger moins de viande et de poissons, moins consommer d'une manière générale, s'engager et sensibiliser son entourage... et se préparer à quelques changements au niveau de son environnement et de son mode de vie. Pour traverser ce siècle, les maîtres-mots pourraient bien être, s'adapter, être autonome, être résilient. Prêt ?

dimanche 3 mars 2019

Coup de gueule numéro 7 : la civilisation Titanic

(Ce texte n'est pas de moi, mais je l'ai trouvé suffisamment pertinent pour le reproduire)

Notre monde est un magnifique paquebot, lancé à pleine vitesse sur une mer calme. Par une froide nuit d’hiver, tu avances vers la proue et y aperçoit un énorme iceberg, bien avant tout le monde. Cependant, tu ne fais pas que de voir cet iceberg, il se trouve que tu as certaines facultés qui te permettent de savoir que 80% d’un iceberg se trouve sous la surface et tu remarques que la quantité hors de l’eau est déjà gigantesque. De plus, tu as fait un peu de résistance des matériaux ainsi que des cours de flottabilité et tu sais qu’à cette vitesse, on va faire un trou dans la coque et que le bateau va couler. Dernier point, tu sais aussi que le bateau n’est pas pourvu du nombre adéquat de canots de sauvetage et qu’en cas de naufrage, beaucoup de passagers vont mourir dans l’eau glacée.

Ton 1er réflexe est de courir vers la passerelle pour parler au capitaine. Tu lui hurles « iceberg droit de devant ! On va couler si vous ne changez pas le cap ! ». Le capitaine n’hausse même pas la tête et te rétorque d’un air dédaigneux « Aucun de mes outils ni indicateurs de navigation ne m’indique quoi que ce soit, je connais mon métier, virez-moi ce guignol ».

Tu te retrouves sur le pont. Ton deuxième réflexe est d’aller en salle des machines car après tout, ce sont eux qui font avancer le bateau, non ?  « iceberg droit devant ! Marche arrière toute, sinon on va couler ! ». Le responsable en chef vient te voir et te réponds : « Nous on prend les ordres d’en haut, et ils nous disent d’accélérer ! On va pas écouter un guignol qui va nous faire virer ! Allez, dehors ! »

Tu te retrouves sur le pont. Dernier espoir, tu tentes d’aller dans la grande salle de réception, pour organiser une rébellion contre le capitaine qui ne veut rien voir de ce qui nous arrive. « Tous avec moi ! Il faut reprendre le contrôle du bateau sans quoi nous allons taper un iceberg et la plupart d’entre nous va mourir ! »

Après un petit temps de silence, tout le monde éclate de rire. « Toi et tes prédictions de malheur, t’es très très pessimiste en fait ! », « Attend, y a le barman qui paye sa tournée, on ira faire ça demain, OK ? », « Mais on est bien là, y a rien qui nous fait penser qu’on va couler », et bien sûr le gars au fond de la salle qui te dit « Moi je crois pas aux icebergs ». « Allez, tu casses l’ambiance ici, soit plus positif, dégage ! ».

Tu te retrouves sur le pont. Seul et désespéré. Tu retournes à l’avant du paquebot et remarques que l’iceberg approche, que le créneau temporel pour l’éviter ou pour atténuer son impact se rétrécit d’heure en heure…

Et là, viennent te voir deux matelots qui t’ont entendu parler au capitaine, cinq ouvriers de la salle des machines et quelques personnes de la grande salle moins bourrés que les autres. Ils ne sont pas là parce qu’ils te croient sur parole, ils sont là parce que si jamais ce que tu dis est vrai, ça risque de tellement mal se passer pour eux qu’ils doivent au moins saisir l’occasion de savoir s’il y a oui ou non un iceberg droit devant.

Une fois qu’ils l’ont tous en visu et que tu leur expliques la résistance des matériaux et le manque de canots de sauvetage, la moitié d’entre eux s’effondre littéralement. Trop de désespoir, le choc psychologique est trop important et ils vont mettre du temps à s’en relever. « À quoi bon ? » se disent-ils.

L’autre moitié est prête à se retrousser les manches, à tout faire pour éviter l’iceberg ou limiter le nombre de morts noyés dans le naufrage. Mais là encore, se distinguent deux groupes : certains veulent aller voir le capitaine, puis la salle des machines, puis tenter une révolution dans la grande salle. Mais toi tu sais que ça ne marchera pas. Tu as déjà essayé. Tu les laisses faire, en te disant que plus il y aura de monde qui passera par ces trois étapes, plus il y aura de chances que le capitaine ouvre les yeux, bien qu’il soit sans doute trop tard.

Le dernier groupe se focalise sur un autre point, assez délaissé depuis le début : le nombre de canots de sauvetages. Ils commencent à en construire d’autres avec des lattes du pont supérieur, dans le but de pouvoir sauver plus de monde en cas de collision avec l’iceberg.

C’est avec ces derniers qu’il faut désormais travailler.

L’iceberg est trop proche pour l’éviter.
Le paquebot a trop d’inertie pour ralentir suffisamment avant l’impact. 
Le Monde-Titanic est voué à sombrer, la seule chose que nous pouvons désormais faire c’est de construire des canots de sauvetage, nous permettant de faire survivre le plus de monde au naufrage.

(©Julien Wosnitza)