jeudi 2 mars 2017

"Vers la guerre civile moléculaire", conférence de Bernard Wicht

Le titre de cette conférence illustre à lui seul l'évolution de la situation en Europe : ses façades Sud (Afrique du Nord) et Est (Proche-Orient) sont la proie au mieux du chaos, au pire de la guerre, tandis que le déferlement migratoire continue à se succéder de façon incontrôlée.

Alors pourquoi "guerre civile" ? parce que ce conflit ne se déroule pas sur un champ de bataille, mais prend place au sein de la société, à l'intérieur même du corps social.
Pourquoi  "guerre moléculaire" ? parce que les prochaines guerres ne seront pas le fait d'armées nationales mais de petits groupes : terroristes, guerrilleros ou bandits, qui s'appuient sur le fanatisme et l'idéologie.

Quelles sont les caractéristiques de l'armée ennemie ?
  • elle est transnationale : mafias et trafiquants, terroristes, etc.
  • elle est low tech/low cost : l'armement utilisé est celui d'un fantassin, soit principalement le fusil d'assaut (en général Kalachnikov AK47)
  • elle met en scène un récit commun, basé sur les émotions, les ressentiments, les frustrations
  • sa tactique : créer l'insécurité, par exemple via des attentats, zébrer les territoires : alors que l'Etat parvient à contrôler/sécuriser certaines régions, d'autres sont abandonnées et deviennent des zones de non droit
  • elle se finance via l'économie grise : hold-up, chantage, extorsion, trafics, enlèvements...
Comment les démocraties perdent ces conflits de basse intensité ?
  • elles n'identifient  ni la menace, ni l'ennemi (les guetteurs des banlieues sont tolérés, les milices citoyennes, non)
  • elles sont en panne de cause; car par beau temps, on peut se soucier des droits de l'homme et du multiculturalisme; mais quand les nuages s'amoncellent, les populations se préoccupent avant tout de leur emploi, de leur pouvoir d'achat, de leur sécurité; le système démocratique qui ne répond pas à ces attentes devient instable (virage populiste ?)
  • elles connaissent une dérive policière et autoritaire (état d'urgence, surveillance des habitants)
  • elles désarment leurs citoyens (voir la nouvelle directive établie par la Commission européenne, qui sera applicable à tout l'espace Schengen)
  • elles sont exposées à des risques de guerres civiles potentielles
Quelle est la solution ? il faut retrouver une échelle d'organisation adaptée au conflit.
L'organisation politique doit donc être à la même échelle que l'ennemi, et au niveau de la menace.
Sinon c'est la défaite, comme par exemple pour les Etats-nations qui n'étaient pas l'échelle adaptée pour les guerres de décolonisation (armée régulière vs guerilla)
Il faut également :
  • comprendre que la guerre c'est le désordre
  • distinguer dedans/ami et dehors/ennemi, distinction qui doit être rétablie; les gangs qui tiennent les banlieues françaises l'appliquent via la présence de guetteurs qui signalent toute intrusion
  • redéfinir l'unité militaire (se mettre à l'échelle)
  • travailler dans la marge d'erreur du système : être capable de faire ce que l'Etat ne peut plus ou ne veut plus faire
  • construire la deuxième ligne de défense : lorsque la 1ère ligne de défense étatique cède (police, armée), une 2ème ligne est prête à prendre le relais (par exemple milice citoyenne)
Le Mexique est l'un des meilleurs exemples actuels de guerre civile moléculaire, où les gangs, cartels, narcotrafiquants sont de mèche avec l'armée et la police corrompues.
La population civile ne sachant plus vers qui se tourner pour assurer sa sécurité, des milices locales se sont organisées pour rendre son quartier ou son village sûrs.

Cette guerre civile moléculaire est un nouvel équilibre de la terreur au niveau du citoyen, car il est devenu une cible (attentats); mais ce citoyen, est-ce qu'il est prêt, est-il en mesure de faire face, de répondre à cette menace ?

Fred Deion

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire